Très vénérables et vénérables Archevêques et Métropolites,
Évêques bien-aimés en Dieu, louable Clergé, révérend Ordre Monastique,
bien-aimés frères et sœurs, en Ukraine et en terres d’accueil
Et le Verbe s’est fait chair et Il a demeuré parmi nous,
et nous avons vu sa gloire,
gloire qu’il tient de son Père comme Fils Unique, plein de grâce et de vérité
Jean 1,14
Le Christ est né ! Glorifions-Le !
Aujourd’hui, nos cœurs sont emplis de la joie lumineuse de Noël. Le Dieu d’avant tous les siècles devient homme afin d’unir et de réconcilier l’homme avec Lui. Le Fils de Dieu devient le Fils de la Vierge de Nazareth, le Dieu tout-puissant se fait enfant fragile et se donne à porter par des mains humaines. Pour nous, chrétiens, ce grand mystère, inconcevable, de l’Incarnation du Fils de Dieu est la clé pour connaître la nature du Seigneur Dieu, pour connaître son amour envers le genre humain ainsi que la clé pour comprendre l’histoire du salut. La Naissance du Christ nous montre qui est Dieu et comment nous devons nous conduire envers Lui et les uns envers les autres.
Contemplant le Dieu éternel, né dans une pauvre masure, l’Eglise chante : « Tu es descendu du sein du Père, Toi qui aimes les hommes, et dans ton indicible humilité Tu as reçu une pauvreté surnaturelle. Toi Seigneur, Tu as voulu t’établir dans une masure, et enfant, alors que Tu es Créateur et Dieu, tu te nourris au sein. C’est pourquoi les sages conduits par l’étoile t’apportent des présents comme une créature à son Souverain, et que les bergers avec les anges s’étonnent et proclament : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, Toi qui descends naître sur terre. » ( Stichères du 4°Dimanche de l’Avent)
Par la naissance au milieu de nous de son Fils unique, le Créateur tout-puissant de tout ce qui visible et invisible nous révèle la réalité des vérités les plus essentielles et les plus profondes concernant la conduite des parents envers leur propre enfant. Il se comporte en Père aimant avec ses créatures, prend soin que Son Enfant possède tout ce qui est nécessaire pour vivre et grandir jusqu’à sa plénitude, à son Image et à sa Ressemblance. Dans la figure de la Vierge Marie, Il nous révèle la grandeur de la mère, qui partage son propre corps pour mettre au monde un enfant, et qui jour et nuit, dans la douceur et la générosité, le veille, lui offrant les forces les plus élevées de son âme, son univers spirituel, empli de la grâce de l’Esprit Saint.
Le Fils Unique de Dieu, « vrai Dieu du né du vrai Dieu », accomplissant la volonté du Père, a voulu être conçu et porté pendant neuf mois dans les entrailles maternelles et naître dans toute la faiblesse et la fragilité de la nature humaine, « prenant la condition d’esclave ». (Phil. 2-7) Il n’est pas devenu simplement homme mais a pris sur Lui toute la sensibilité et la faiblesse humaines, et devenant enfant, Il a personnellement vécu toutes les difficultés et les dangers liés à la condition humaine. Dans le Christ Jésus, Dieu a pris sur Lui, pour toujours, l’entièreté de ce que disons « être Homme »—avec toutes les dimensions de l’existence humaine tant dans toute sa grandeur que dans toute sa dimension dramatique.
Sur la base d’une telle expérience à la fois divine et humaine, le Tout-Puissant sait ce qui me fait mal, pourquoi je pleure ou je suis heureux. Il connaît chacun d’entre nous, parce que, jusqu’à la fin du monde, il continue de vivre avec l’homme et dans l’homme. Il continue de souffrir avec chaque souffrance humaine, il se réjouit en chacune de nos joies, ne cesse de mourir dans chaque mort, ne cesse d’être persécuté et humilié en chaque personne que le monde contemporain rejette et méprise. Noël—c’est la naissance de Dieu en moi, l’incarnation du Fils de Dieu dans l’histoire de ma vie, dans ma vie, quelqu’infime ou quelque compliqué que cela me paraisse. Ma vie, alors, quelle qu’elle soit, a un sens, parce que tout ce qui relève de ma personne Lui est devenu personnel pour l’éternité!
Aujourd’hui le Christ Dieu naît dans l’histoire de notre peuple et de sa sainte Eglise « pour nous les hommes et pour notre salut ». En ce moment historique, dont nous vivons l’épreuve en synode, Il « peut sauver de façon définitive ceux qui par Lui s’avancent vers Dieu, étant toujours vivant pour intercéder en leur faveur » comme nous le lisons dans l’épître aux Hébreux (7-25). Mais de même que, jadis à Bethléem, Jésus eut besoin de Marie et Joseph pour qu’ils l’introduisent dans le monde des hommes, Il a, de même, aujourd’hui, besoin de nous, chrétiens du troisième millénaire, afin que par notre foi nous l’introduisions dans notre monde, dans l’histoire contemporaine et sa culture. Davantage même, nous devons amener le Christ, né aujourd’hui pour notre salut, dans tous les recoins de notre vie personnelle, familiale et sociale. Dieu veut y entrer et y être personnellement présent, mais en même temps Il respecte notre volonté et attend notre appel vers Lui.
Il dépend de nous alors—de laisser entrer le Christ Jésus chez nous ou de Lui fermer la porte, comme ce fut le cas lors des demandes à Bethléem. Là où l’on accueille Dieu—tout revit et se renouvelle. Celui qui Lui ouvre son cœur, reçoit l’espérance, un sens nouveau pour son existence actuelle et future. Et au contraire, là où on Le rejette ou qu’on ne Le laisse pas entrer—tout meurt, se soumet à la décomposition, au déclin et à la corruption. Là-bas, l’homme demeure soumis au pouvoir de la mort, à l’influence des faux dieux, à celle de la violence et du mensonge, et, perd, du reste, le sens de sa propre vie, de l’espoir dans le lendemain, parce que tout meurt devant ses yeux dès aujourd’hui.
Pour cette raison, célébrons la Nativité du Christ, en laissant le Christ Sauveur qui naît pénétrer tout ce qui est notre humanité. Enveloppons-Le des langes de notre vie personnelle, familiale et sociale. Réchauffons-Le de notre foi vivante. Avec notre espérance, élançons-nous audacieusement à sa suite, comme les Mages après l’étoile de Noël. Que notre aujourd’hui soit illuminé par la douceur de l’amour que répand sur nous l’Enfant Divin.
Gardons-nous du péché dans notre vie personnelle et faisons le bien. Efforçons-nous de remplir de Dieu nos pensées et nos décisions de vie. Vivons de telle façon que tous nos proches voient que nous sommes enfants de Dieu parce que nous allons selon sa Parole et selon ses commandements. Dans les circonstances difficiles de la vie, n’oublions pas que Dieu nous aime de son amour incommensurable, plus grand que nos manquements et nos échecs, plus fort que nos péchés et nos fautes. Notre Créateur veut que nous soyons capables en tout temps d’apporter son amour dans la vie des autres—de l’incarner dans nos relations et nos actions. La naissance du Christ—ce n’est pas seulement un fait historique « aux jours d’Hérode, roi de Judée » (Luc, 1-5). La naissance du Christ—c’est l’avènement spirituel de la présence permanente de Dieu, qui s’incarne chaque instant et en chaque lieu, qui s’accomplit pour moi et en moi.
Efforçons-nous, dans notre vie de famille, de vivre en tout dans l’amour et l’entente. Parents, souvenez-vous que les enfants créent, le plus souvent, l’image de Dieu sur la base de votre conduite, de votre amour l’un pour l’autre, de votre générosité, de votre authenticité et de votre joie de vivre. Eduquez-les à prier sincèrement d’abord par votre exemple. En toute circonstance, rappelez-vous que vos enfants vous ont été confiés par le Créateur même et Père Céleste afin que vous les unissiez à son amour et pour sa gloire. En ces jours de fêtes, créez donc pour vos enfants de beaux souvenirs de Noël, qu’ils puissent ressentir la joie de la vie chrétienne qui donne la possibilité de surmonter toutes les difficultés et malheurs.
Dans notre vie sociale, spécialement parmi les défis actuels d’ordre économiques, politiques et de guerre, souvenons-nous que Dieu est avec nous ! Nous ne sommes pas seuls face aux souffrances morales et physiques, face au sang dans cette guerre. Par sa Nativité, le Christ s’incarne aussi aujourd’hui, en ce moment de l’histoire, dans lequel il nous est donné de vivre et de mourir, de construire et de faire renaître, de défendre notre Patrie de l’ennemi et de panser les plaies présentes et à venir. L’apôtre Paul s’adresse à nous en ce jour de Noël dans son appel à une vie de sainteté : « que le Christ habite en vos cœurs par la foi, et que vous soyez enracinés, fondés dans l’amour. Ainsi vous recevrez la force de comprendre, avec tous les saints, ce qu’est la Largeur, la Longueur, la Hauteur et la Profondeur, vous connaîtrez l’amour du Christ, qui surpasse toute connaissance, et vous entrerez par votre plénitude dans toute la Plénitude de Dieu ». (Ep. Aux Eph. 3, 1-19)
Nous, chrétiens, sommes appelés aujourd’hui, comme le furent les bergers de l’Évangile qui, les premiers reçurent l’annonce de la naissance du Christ, à porter cette nouvelle au monde et à la partager avec notre prochain. En accomplissant cette mission de Noël, emplissons nos demeures, nos sanctuaires et toute notre terre du chant ancestral de la koliada. Que l’Ukraine entière chante aujourd’hui les koliadys, tous et partout, là où bat un cœur ukrainien ! Que la joie de cette fête nous emplisse de l’espérance de la victoire, non la nôtre, mais celle du Christ qui, seul, pourra unir ce qui aujourd’hui semble désespérément désuni, tant en Ukraine que dans le monde.
Amenons avec nos koliadys le Sauveur Nouveau-né à chacun, à celui qui est aujourd’hui dans la tristesse et à celui qui se sent seul. Partageons notre joie ainsi que le repas de cette Veillée sainte avec ceux qui ont faim et soif de justice et d’attention humaine. Rendons visite à celui qui est détenu, à ceux qui séjournent à l’étranger ou qui sont en route. Portons la lumière de Noël aux blessés et aux souffrants. Souvenons-nous dans nos prières des prisonniers, de celui qui subit des outrages et de celui qui crie vers Dieu pour une lueur d’espérance sous les tirs de la ligne, ainsi nommée, de démarcation dans les territoires occupés de l’Est de l’Ukraine et de la Crimée. Par la pensée et la prière, unissons-nous à nos soldats qui défendent courageusement notre Noël. N’oublions pas non plus ceux qui attendent avec impatience leur retour à la maison.
Où que soyez, chers frères et sœurs, du plus jeune au plus âgé, en Ukraine, ou sur une terre d’accueil, je souhaite du fond du cœur, à chacun de vous, une délicieuse kutia, de joyeuses Fêtes de la Nativité du Christ ainsi qu’une nouvelle année pleine de bénédiction.
Le Christ est né ! Glorifions-le !
† SVIATOSLAV
Donné à Kiev,
a la Cathédrale patriarcale de la Résurrection du Christ,
en ce jour du Saint Apôtre André, premier nommé
le 13 décembre 2016
Traduction d’ukrainien en français : Maria Denysenko