Homélie de Mgr Hlib Lonchyna pour la Pentecôte

Ac 2,1-11 ; Jn 7,73-52 ; 8,12

La descente du Saint-Esprit sur les disciples de Jésus le jour de la Pentecôte n’a pas été un évènement isolé, car il a eu des précédents dans l’histoire biblique. 

Le kondakion de la fête nous donne une première indication. « Ayant confondu les langues de l’univers, le Seigneur du haut des cieux dispersa les nations ». La référence est au livre de la Genèse, chapitre 11, qui raconte l’histoire de la tour de Babel.

« Toute la terre avait alors la même langue et les mêmes mots… – annonce le texte sacré. – Ils dirent : “Allons ! bâtissons-nous une ville, avec une tour dont le sommet soit dans les cieux. Faisons-nous un nom, pour ne pas être disséminés sur toute la surface de la terre” » (Gn 11,1.4).

Le problème ne réside pas dans la construction de la ville ou de la tour mais dans le motif des bâtisseurs : pourquoi ont-ils décidé de les construire ? Pour se faire un nom, c’est-à-dire pour leur propre gloire. Ils ont voulu défier le Seigneur, ils ont voulu s’opposer à lui ; ils s’étaient imaginé pouvoir remplacer la providence divine par leur propre savoir. Toutefois, il est totalement impossible de se substituer à Dieu ; lorsque la folie des individus les pousse à mettre en œuvre une entreprise d’un tel orgueil, le résultat est toujours désastreux pour les hommes eux-mêmes.

Nous voyons bien que C’est exactement ce qui s’est passé ici. Le Seigneur a dit : « “Allons ! descendons, et là, embrouillons leur langue : qu’ils ne se comprennent plus les uns les autres.” De là, le Seigneur les dispersa sur toute la surface de la terre. Ils cessèrent donc de bâtir la ville » (v. 7-8).

Pourquoi le Seigneur embrouille-t-il leur langue ? Il ne peut pas s’agir d’un Dieu qui redouterait l’homme, qui verrait en lui un concurrent. C’est plutôt une manière de nous donner un enseignement, une illustration de ce qui arrive quand, par malheur, nous cherchons à nous distancier du Créateur de l’univers.

Pendant la Dernière Cène (Jn 15,5), le Christ, n’a-t-il pas dit aux disciples – et à nous tous – « En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire » Lorsque nous le nions, Dieu ne vient pas nous punir. C’est nous qui nous détachons nous-mêmes de la source de la vie. C’est donc en nous séparant de lui que nous nous séparons aussi les uns des autres. Ainsi, les hommes de Babel ont cessé de se comprendre et ils ont été dispersés de par le monde. C’est la signification de cet épisode.

L’humanité à elle toute seule n’a pas pu se sortir de cette situation de chaos, de méfiance, de division. Il a fallu que la force divine s’y emploie pour apporter un remède. Dieu a agi de deux manières : par l’attraction et par l’invitation. Ce sont d’abord la crucifixion et la résurrection du Christ qui ont attiré les hommes au Seigneur. « Moi, quand j’aurai été élevé de terre, – a dit Jésus avant de mourir sur la croix – j’attirerai à moi tous les hommes » (12,32). Ensuite, pour ne pas laisser ses disciples seuls, il leur a envoyé l’Esprit-Saint. « En partageant les langues de feu, – proclame le kondakion – il invite tous les hommes à l’unité ». C’est l’Esprit qui renouvelle l’harmonie, la charité et l’unité parmi les hommes.

Chers sœurs et frères, remercions Jésus qui par le Père a envoyé ce même Esprit-Saint sur nous aussi ; il vient pour renouveler notre vie. Le Seigneur ne nous donne pas seulement des commandements à suivre, mais il nous donne aussi la force, le pouvoir et la capacité de les accomplir ! Il faut y croire car le Seigneur nous l’a promis : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20). Il est présent avec nous et en nous par l’Esprit-Saint. C’est pour cette raison que nous avons déclaré dans le kondakion que « tous ensemble nous glorifions le très-saint Esprit ».

Senlis, en l’église des Saints Borys et Hlib, le 23 mai 2021