Lors du « filtrage », leurs enfants leur ont été enlevés. Où sont ces enfants ? – Sa Béatitude Sviatoslav – 19 octobre 2022

Secrétariat du Primat de l’EGCU (Église gréco-catholique ukrainienne) – Rome

Sa Béatitude Sviatoslav Shevchuk – Archevêque Majeur 

Gloire à Jésus-Christ !

Chers frères et sœurs en Christ ! 

Nous sommes aujourd’hui le mercredi 19 octobre 2022 et le peuple ukrainien mène depuis déjà 238 jours, une lutte héroïque contre les occupants russes qui sont venus sur notre terre. De violents combats ont encore eu lieu hier sur toute la ligne de front. La situation probablement la plus difficile, peut-être, est dans la région de Donetsk, au sud de notre patrie, dans notre région de Kherson.

L’ennemi bombarde nos paisibles villes et villages avec divers types d’armes. Rien qu’hier, 10 frappes de missiles, 18 frappes aériennes et 76 frappes de systèmes à réaction de divers types ont été effectuées. 10 agglomérations de notre patrie ont été touchées. Hier, l’ennemi a de nouveau attaqué la ville de Kyiv avec ses drones kamikazes. L’infrastructure vitale de notre capitale a été endommagée. Il a également attaqué la ville de Dnipro, Kryvyi Rih, Zaporizhia, notre Mykolaïv qui souffre depuis si longtemps.

Aujourd’hui, je rentre d’un voyage pastoral à Odessa et dans l’oblast de Mykolaïv. J’ai vu les visages courageux de nos soldats, les yeux larmoyants des mères. Mais la volonté indomptable de tout notre peuple est visible. Une volonté indomptable de défendre la Patrie. En regardant dans les yeux des enfants et des aînés, des femmes et des hommes, de nos soldats et des représentants des autorités ukrainiennes, nous pouvons dire avec confiance : L’Ukraine est debout ! L’Ukraine se bat ! L’Ukraine prie !

J’ai également eu l’occasion de rendre visite à nos militaires blessés, et j’ai été particulièrement impressionné par la possibilité de communiquer avec un soldat qui a survécu à 2 graves commotions cérébrales. Il a parlé avec sincérité de ses expériences, de ses blessures. Et il m’a en quelque sorte prévenu que ceux qui ont survécu au drame de la guerre, ceux qui étaient au front, ont vraiment de sérieuses difficultés à retourner à la vie civile.  Parce qu’il est très facile d’entrer dans une guerre, mais il est difficile d’en revenir. Il lui semblait que même à l’hôpital, il était entouré d’ennemis. Que de blessures cette guerre a infligées même à ceux qui sont les plus stables, les plus forts.

À la lumière de cette douleur commune à toute une nation, je veux aujourd’hui poursuivre nos réflexions sur la façon dont nous pouvons préserver et protéger la famille ukrainienne. Cette cellule de base de toute société. L’église domestique, dans laquelle pendant des siècles non seulement une nouvelle vie est née, mais aussi notre culture, la conscience nationale a été nourrie et, plus important encore, la foi chrétienne a été transmise.

Hier, nous avons mentionné à quel point la violence est dangereuse pour la famille. Nous avons réfléchi à la violence extérieure que les occupants infligent à nos femmes, filles, hommes, voire enfants. Mais aujourd’hui, je voudrais que vous et moi découvrions un autre grand danger. Le danger de la violence, que nous appelons la violence domestique. Parce que parfois, en temps de guerre, comme me l’a dit le chef de l’administration militaire de Mykolaïv, les gens deviennent insensibles. Ils deviennent insensibles à la douleur et à la souffrance de ceux qui sont peut-être les leurs, les plus proches. Les horreurs vécues pendant la guerre accompagnent tout le monde et les hommes et les femmes aussi chez eux. Et donc, pour aider la famille à se relever, nous devons tous ensemble nous opposer résolument à la violence domestique sous toutes ses formes.

Aujourd’hui, nos familles, en particulier les familles d’hommes et de femmes ayant vécu la guerre, ont besoin d’une pastorale particulière. Ils ont encore besoin de réhabilitation, de temps et d’espace pour être à nouveau capables d’aimer. Nous devons tous nous soutenir ensemble ! Avec l’aide de la prière, avec l’aide de l’affection, de la chaleur de la communauté ecclésiale, chercher des moyens d’aider nos défenseurs à revenir du front en un jour, à retrouver une vie de famille normale.

Avec l’aide de la prière, l’aide de l’affection, de la chaleur de la communauté ecclésiale, cherchons des moyens d’aider nos défenseurs qui rentreront bien un jour du front, à retrouver une vie de famille normale.

Lors de nos visites, j’ai eu l’occasion de voir les larmes de pères et de mères dont les enfants ont été emmenés de force par les occupants. Beaucoup de nos compatriotes sortis, parfois même par miracle des territoires occupés, racontent les indescriptibles humiliations et sévices dans les camps de filtration avant leur libération des territoires occupés. Et il existe de nombreux cas où chaque membre de la famille a été « filtré » séparément. Et parfois, avec horreur, papa et maman voient qu’ils ont été libérés et que l’enfant leur a été enlevé. Où sont ces enfants ? Combien y en a-t-il ? On ne connaît même pas la fin. J’ai vu les larmes de papas et mamans qui ne savent pas où est leur enfant.

Nous prions pour ces enfants. Nous prions pour ces familles. Pour ceux qui ont été arrachés de force à la protection et à l’amour de leurs parents, leur famille.

Et aujourd’hui, nous demandons : Dieu, bénis l’Ukraine ! Dieu, par la puissance de ton amour pour nous, rends-nous, en particulier les chrétiens, capables d’être des témoins de ton amour ! Dieu, aide-nous à construire des familles chrétiennes comme foyers d’amour vrai, fécond, fidèle, inébranlable ! Parce que tu nous aimes de cet amour.

Ô Dieu, bénis notre armée ukrainienne, nos filles et nos garçons qui protègent notre patrie !

Ô Dieu, accorde à notre terre ukrainienne Ta paix juste et céleste !

Que la bénédiction du Seigneur soit sur vous avec Sa grâce et Son amour pour l’humanité pour toujours et à jamais. Amen

Gloire à Notre Seigneur Jésus-Christ !

+ Sviatoslav