LETTRE PASTORALE DE NOEL DE SA BEATITUDE SVIATOSLAV

Вих. ВА 21/354

Chers frères et sœurs dans le Christ
En Ukraine et de par le monde !

« Gloire à Dieu au plus haut des cieux, 
et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime. »
(Luc 2:14)

Le Christ est né ! Glorifions le !

Bien-aimés en Christ!

Aujourd’hui, nous partageons avec vous une grande joie qui a d’abord été reçue et partagée par des bergers anonymes de Bethléem, qui, dehors, en plein champ, veillaient sur leurs troupeaux au milieu de la nuit. Comme l’a écrit l’évangéliste Luc, lorsqu’un ange du Seigneur leur est apparu, ils furent tout d’abord saisis de frayeur. Mais l’ange leur dit : « « Ne craignez pas, car voici que je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur (Lc 2, 10-11). Et puis, quand les bergers entendirent les chœurs angéliques chanter : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux », ils se dirent les uns aux autres : « « Allons jusqu’à Bethléem pour voir ce qui est arrivé, l’événement que le Seigneur nous a fait connaître » (Lc 2, 15). Et ils s’y rendirent, et ont trouvé Marie et Joseph avec l’enfant, et, leur ayant manifesté le respect qui lui était dû, sont sortis et ont parlé de Jésus aux autres.

La bonne nouvelle de Noël est une fête de la confiance, non seulement de la confiance partagée entre nous, êtres humains, mais, surtout, de la confiance que Dieu place dans l’humanité. Nous parlons souvent de notre foi en Dieu, mais nous notons rarement la bonne volonté de Dieu envers nous, sa fidélité et sa confiance en nous. Le Seigneur a confié la première bonne nouvelle de la naissance de l’Enfant divin à de simples bergers, puis il a partagé la Bonne Nouvelle de l’Évangile avec les femmes porteuses de myrrhe, les pêcheurs et les collecteurs d’impôts, avec des gens simples et parfaitement inconnus.

Dans la Nativité du Christ, le Père Céleste confie son Fils unique à l’humanité, et Dieu devient homme ! Le chœur des anges proclamant « Paix sur terre aux hommes de bonne volonté » exprime le fait que Dieu considère l’homme comme digne de sa confiance et de sa faveur, de sa préférence et de sa bonne volonté (c’est ainsi que nous traduisons littéralement le terme grec, eudokia). Il nous considère comme bons et croit en nous. Il ne nous voit pas seulement tels que nous sommes aujourd’hui, avec toutes nos faiblesses et nos péchés, notre pauvreté et nos interrogations. Le Fils de Dieu voit en nous Son Image. Dans son incarnation, il prend notre nature humaine et nous apprend à le voir, Lui le Sauveur du monde, dans un petit enfant! Nous voyant comme des personnes de bonne volonté, il nous voit comme ceux que nous pouvons devenir par le pouvoir de sa grâce, tout comme des parents aimants voient en leur enfant un futur écrivain ou un  artiste talentueux, une bonne mère ou un père tendre et responsable, le leader d’un peuple ou son puissant protecteur.

Dans ce mystère de Noël, la figure de la Theotokos personnifie la confiance que nous, les humains, devons cultiver envers notre Créateur et Sauveur, en réponse à la confiance de Dieu en nous. La Mère de Dieu, qui tient dans ses bras le petit Jésus dans une étable froide, nous enseigne que nous pouvons et devons faire confiance à Dieu et à notre prochain, puisque le Seigneur nous a aimés le premier et s’est confié à nous. En recevant la parole de l’archange, elle a donné à Dieu l’espace de son propre corps, et lui a donné son humanité, sa nature humaine. Pourtant Saint Joseph, le gardien de Jésus et de sa Mère, ayant appris que Marie est enceinte, songe d’abord à la laisser partir sans scandale. Mais, lorsque l’ange du Seigneur lui apparait en songe et dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint»  (Mt 1 :20), il a cru, il s’est confié à Dieu et a tout fait comme l’ange lui avait ordonné, justifiant ainsi la confiance du Seigneur en lui.

Nous vivons dans un monde où la confiance n’est pas seulement blessée, mais constamment attaquée. Une grande crise de confiance se fait sentir dans les différentes sphères de la vie sociale et même ecclésiale. A cause des nouvelles technologies de communication, la manipulation de la vérité, qui a toujours existé tout au long de l’histoire de l’humanité, est aujourd’hui portée à la vitesse de l’éclair partout dans le monde. On ne sait plus quoi croire, ni à qui faire confiance. Notre compréhension est imprégnée de la conviction que dans le monde il n’y a ni vérité ni justice, et qu’à chaque pas il n’y a que tromperie, mensonge et duplicité.

Cette situation dramatique est illustrée dans l’icône de la Nativité. L’esprit malin, représenté sous la forme d’un vieil homme vêtu de peau de bête, tente Joseph, cherchant à faire naître en lui le doute sur l’Enfant et sa Mère. Cela ne devrait surprendre personne, car le diable, le père du mensonge (voir Jn 8:44) cherche à chaque pas à semer la méfiance et le doute, en ce qui concerne la bonne volonté de Dieu envers nous, et à favoriser les conflits interpersonnels à tous les niveaux, dans le domaine personnel, familial et la vie communautaire.

La pandémie actuelle a encore accru cette crise de confiance. Étant donné que le virus se cache à l’intérieur d’une personne, l’autre devient pour moi une source potentielle de maladie, voire de mort. Cela introduit dans les relations humaines des éléments de suspicion, de peur et de fuite.

Notre attitude envers les institutions sociales et gouvernementales est également marquée par la méfiance. Les diverses allégations de complot concernant la sécurité du vaccin contre le coronavirus augmentent une certaine méfiance à l’égard de l’autorité, déjà répandue dans notre société, et suscitent chez nos concitoyens encore plus de confusion et de peur pour l’avenir. Les gens ne croient pas que le gouvernement et les autres institutions soient appelés à se soucier du bien commun et des services sociaux de santé, comme c’est leur responsabilité. Peut-être, en raison de l’histoire du 20ème siècle, les sociétés post-soviétiques ont-elles une tendance plus grande, que dans d’autres parties du monde, à ne pas croire les institutions gouvernementales, et deviennent ainsi facilement sensibles à toutes sortes de manipulations et de propagande. De même, dans les pays politiquement polarisés du monde occidental, la propagation de la peur et de la méfiance est également utilisée comme instrument de guerre politique. Cependant, il est important de se rappeler que lorsque nous adoptons un principe de « je ne crois personne », nous faisons toujours le jeu de quelqu’un d’autre, et ce quelqu’un exploite notre déception à ses propres fins. La méfiance détruit les relations humaines à tous les niveaux. La méfiance détruit la famille, la société, un peuple et une nation !

En réponse à nos tentations actuelles de méfiance, le Seigneur lui-même vient nous révéler la vérité et nous embrasser dans sa confiance. A la veillée de  Noël, nous chantons: « Tu as brillé, Christ, venant d’une Vierge, comme le Soleil spirituel de la Vérité, et l’étoile T’a révélé, Celui que rien ne peut contenir, couché dans une crèche. Et Tu as amené des sages pour qu’ils Te rendent grâce ; avec eux, nous aussi te glorifions : Gloire à Toi qui donne la vie, gloire à Toi ! » (Tropaire des Vêpres). Célébrer la Nativité du Christ, c’est faire confiance à l’Enfant Divin qui vainc la mort et, en acceptant la vie humaine, apporte le don de Sa Vie Divine. La Nativité n’est pas un joli conte de Noël, mais un événement unique dans l’histoire, qui témoigne de la confiance du Seigneur dans l’humanité. Dieu croit en sa création. Il croit en nous plus que nous ne croyons en nous-mêmes.

Par la foi en Dieu, par sa naissance parmi nous, restaurons notre confiance en une humanité qui Le cherche ! Soyons reconnaissants de la faveur de Dieu et apprenons à investir notre faveur dans les autres personnes, à voir en elles leurs bons côtés, leurs dons et talents, leurs capacités et hauteurs d’esprit. Bien qu’aujourd’hui la propagation du virus nous oblige à nous couvrir la bouche et le nez de masques de protection, au nom de Dieu, ne fermons pas notre cœur aux autres ! Laissons-les voir la joie, l’amour et la bonté dans nos yeux ! En effet, au milieu des défis et des épreuves de la pandémie, soyons les hérauts de la bonne volonté divine.

Mon souhait est qu’à l’exemple de la Sainte Famille, nos familles soient un lieu de respect mutuel, d’amour et de confiance. Je vous demande particulièrement, chers parents, de cultiver un esprit de confiance chez vos enfants, afin que, lorsqu’ils rencontrent les défis de ce monde, ils sachent qu’ils peuvent toujours compter à la fois sur vous et sur notre Seigneur Dieu, qui les a confiés à vos soins. Aux différentes étapes de la croissance de vos enfants, cultivez et construisez la confiance et le respect mutuel dans la joie, l’amour et la patience. Soyez pour eux leurs premiers maîtres d’une foi profonde, un exemple de prière fervente, encouragez-les à servir leur prochain, dès leur plus jeune âge. Accordez la plus grande attention au temps de transition de l’enfance à la jeunesse, veillez à ce que vos enfants sachent distinguer entre le faux et l’authentique, entre la vérité divine et le mensonge diabolique. Que votre progéniture sache que non seulement vous croyez en eux et pouvez voir leur avenir dans des talents réalisés et des dons divins, développés dans leurs âmes ; mais aussi que notre Seigneur Dieu Lui-même croit en eux et les appelle à faire ses bonnes œuvres dans le monde.

Où que nous soyons, nous créons tous notre Bethléem moderne dans une confiance mutuelle ! Nous qui célèbrons dans le cercle familial, dans une joie sincère ; nous qui sommes éloignés de nos proches, dans un sentiment d’unité spirituelle ; nous tous qui pouvons venir à l’église vivre l’expérience de la sainte solennité de la fête et dans l’amour du Christ, qui se donne à nous en nourriture spirituelle, comme signe qu’Il croit en nous ; nous qui participons aux offices en ligne, dans le désir d’être en union avec nos frères et sœurs en Christ. Que chacun de nous partage la joie de Noël, de toutes les façons possibles ! Et que les chants de Noël traditionnels ukrainiens résonnent partout.

Chers frères et sœurs ! En ce jour de fête, je vous exprime ma confiance et ma foi, que vous-mêmes sentiez intuitivement comment bien accueillir le Sauveur nouveau-né, et sachiez partager la joie de cette rencontre avec ceux qui vous entourent. A l’occasion de la Nativité du Christ, je vous salue tous chaleureusement : d’Est en Ouest, du Nord au Sud, en Ukraine et à l’étranger, sur tous les continents du monde. De manière particulière, je m’unis à ceux qui sont tristes ou qui se sentent seuls, à tous ceux qui travaillent loin de chez eux et précisément en ce moment, vivent l’absence de leurs proches et regrettent la chaleur de la maison familiale. J’exprime mes condoléances aux familles pour qui cette année il est pénible de s’asseoir au diner du soir  de Noël, alors qu’à table il y a un siège vide, occupé il n’y a pas si longtemps par un père ou une mère, un mari ou une femme, un frère ou une sœur, un fils ou fille. Les larmes aux yeux, soyez joyeux dans la foi qu’aujourd’hui vos proches célèbrent au ciel. Je partage ma joie de Noël avec nos personnes âgées—grands-mères et grands-pères, mais aussi avec les nécessiteux. Je salue sincèrement nos soldats en première ligne, notre fierté. Mes pensées s’envolent vers nos prisonniers de guerre et les captifs : en vous transmettant mes vœux de Noël, je vous encourage à ne pas perdre courage, car notre Seigneur Dieu Lui-même croit en vous. Je salue nos enfants et nos jeunes, notre avenir, et souhaite qu’aujourd’hui votre sourire ne quitte pas votre visage et que votre joie soit complète.

Du fond du cœur, je souhaite à tous la joie authentique des enfants de Dieu, une savoureuse kutia, une joyeuse célébration de la Nativité du Christ et une nouvelle année heureuse, paisible et bénie !

Le Christ est né !  Glorifions Le !

† SVIATOSLAV

Fait à  Kyiv
À la cathédrale patriarcale de la Résurrection du Christ,
Le jour du très louable Saint Apôtre André le premier  appelé
Le 13 décembre (30 novembre) de l’année 2021 de Notre Seigneur

Traduction non officielle
Par Ségolène à Paris